Le Marais du XVIIIe au XXe siècle 

Le XVIIIe siècle

Au XVIIIe s., le Marais perd peu à peu son caractère aristocratique pour devenir plus mélangé ; financiers, parlementaires, avocats, notaires y côtoient artisans et commerçants. Quelques hôtels sont reconstruits ou mis au goût du jour (hôtel d’Albret rue des Francs-Bourgeois, hôtel d’Ecquevilly ou du grand Veneur rue de Turenne…). Les derniers hôtels importants sont construits par Ledoux rue Michel-Le-Comte (hôtel d’Hallwill, 1766) et par Lemoine Le Romain pour Beaumarchais sur le boulevard, face à la Bastille (1790). 

 
 ^ Bélanger, porte du jardin de Beaumarchais 
 Le coeur du Marais, plan Vasserot, début XIXe s. >
 

Le quartier se densifie avec la construction d’immeubles de rapport (rue François-Miron, le long des charniers de Saint-Gervais, 137 rue Vieille-du-Temple, 113 bd Beaumarchais…). En 1783, le lotissement du prieuré de Saint-Catherine du Val-des-Ecoliers permet d’élever un nouveau marché au centre d’un ensemble très dense d’immeubles collectifs.

 

Les hôtels de Soubise et de Rohan

L’hôtel de Guise est acheté en 1700 par François de Rohan-Soubise et Anne de Rohan-Chabot, sa femme. L’architecte Pierre-Alexis Delamair construit une nouvelle façade mise en valeur par une majestueuse cour d’honneur à colonnade ouvrant sur la rue des Francs-Bourgeois. Parallèlement, le fils du prince de Soubise, Armand-Gaston, évêque de Strasbourg et futur cardinal, fait construire par Delamair l’hôtel de Rohan, rue Vieille-du-Temple, à l’emplacement de l’hôtel des Bordes. Les jardins sont communs aux deux hôtels. En 1709, Delamair est remplacé par Germain Boffrand qui réalise les décors intérieurs de l’hôtel de Soubise avec les meilleurs peintres de l’époque, François Boucher, Charles Natoire et Carle Van Loo et le sculpteur ornemaniste Jacques Verbeckt.

Les Archives nationales

Les deux hôtels sont saisis à la Révolution et, en 1808, acquis par l’État. Napoléon Ier affecte l'hôtel de Soubise aux Archives impériales et l'hôtel de Rohan à l'Imprimerie impériale. L’accroissement régulier des fonds obligent les Archives nationales à faire bâtir au cours du XIXe siècle une série de dépôts. De 1838 à 1848, les dépôts Louis-Philippe sont édifiés dans le prolongement est de l’hôtel de Soubise, puis, de 1859 à 1880, les dépôts Napoléon III sur l’emprise des anciens bâtiments de l’hôtel de Guise, le long des rues des Quatre-Fils et des Archives. Les travaux sont achevés sous la IIIe République. Parallèlement, les Archives annexent trois hôtels de la rue des Francs-Bourgeois. En 1927, l’Imprimerie nationale quitte l’hôtel de Rohan, qui est alors restauré et affecté aux archives.




La Révolution et l'Empire


Quelques épisodes marquants de la Révolution ont pour cadre le Marais : la prise de la Bastille bien sûr, le donjon du Temple, les massacres de septembre 1792 à la prison de La Force. Vendus comme biens nationaux, des édifices religieux vont disparaître : démolition des églises Saint-Jean-en-Grève, Saint-Paul, des Célestins, des Minimes…, les bâtiments conventuels sont transformés en caserne (les Célestins, l’Ave-Maria), en prison (les Madelonnettes) ou lotis (Filles-du-Calvaire, enclos du Temple). Sous l’Empire, Napoléon crée de nouveaux marchés (celui des Blancs-Manteaux et celui du Temple).

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Le Marais  en 2010  cliquez sur la carte   >

La Restauration et la Monarchie de Juillet

La reconstruction de l’Hôtel de Ville de 1837 à 1846 entraîne la démolition des rues avoisinantes. Deux voies datent de cette époque : la rue du pont Louis-Philippe et la rue Rambuteau ; la rue Malher est tracée sur l’emplacement de la prison de La Force. Les hôtels particuliers accueillent de plus en plus des activités industrielles, artisanales et commerciales ; les cours et les jardins se couvrent de hangars et d’appentis.


Le Second Empire

Le Marais, à l’écart des grands axes de circulation, n’est touché qu’à la marge par les projets haussmanniens : au sud la prolongation de la rue de Rivoli entre l’Hôtel de Ville et la rue de Sévigné, au nord la rue de Turbigo et, à la fin du siècle, la rue Réaumur. Le projet de voie entre la rue du Grenier Saint-Lazare et la rue Roger-Verlomme ne fut pas mis en œuvre. La rue des Archives est alignée et partiellement reconstruite.


Le XXe siècle

Pendant un siècle, de 1850 au milieu du XXe, la densification du quartier se poursuit entraînant des surélévations d'hôtels anciens, une sur-occupation des cours et des jardins et la destruction des décors intérieurs. Au début du XXe siècle des îlots insalubres sont délimités entre Saint-Gervais et l'hôtel Sens, la démolition et la reconstruction s'étaleront jusque dans les années 1950.
Le sud du quartier, autour de la rue des Rosiers et de la rue Ferdinand Duval, accueille une forte communauté juive. C'est une tradition qui date du Moyen Age (juiverie de Saint-Bon) interrompue entre l'expulsion des Juifs en 1394 et la Révolution.  Des synagogues sont construites (rue de Nazareth, rue des Tournelles, rue Malher).
A partir des années 1960, la prise de conscience de l'importance du patrimoine historique et culturel du quartier modifie l'approche de son aménagement qui s'oriente vers la conservation et la mise en valeur et non plus sur la démolition. Le secteur sauvegardé du Marais est créé en 1964 sur 126 hectares.


Sources

Danielle Chadych, Le Marais, évolution d'un paysage urbain, Parigramme, Paris, 2010.

Jean-Pierre Babelon (direction), Le Marais, mythe et réalité, CHMHS et Picard, Paris, 1987.