La chaussée d'Antin
La fin de la Guerre de Sept Ans en 1763 marque le début de l’urbanisation du quartier de la Chaussée d’Antin, entre le boulevard et les Porcherons. Cet ensemble de terrains maraîchers propriété de congrégations religieuses (les Mathurins, l’Hôtel-Dieu) va faire l’objet d’une intense spéculation immobilière, se couvrira d’hôtels construits par les plus grands architectes (Ledoux, Brongniart, Bélanger, de Wailly) et deviendra à la fin du siècle et jusqu’à la Restauration le quartier à la mode, une des meilleurs adresses de Paris tout particulièrement pour les nouveaux riches - financiers, actrices et danseuses de l’Opéra.
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Les Mathurins (1), propriétaires d’un vaste domaine dans le marais des Porcherons, de la rue de l’Arcade à la Grange Batelière, cèdent leurs terrains par bail emphytéotique de 99 ans (leurs terres sont en droit inaliénables) à des spéculateurs, financiers (souvent fermiers généraux), entrepreneurs ou architectes (notamment Brongniart) qui les divisent en lots, ouvrent une voie pour les desservir (si nécessaire) et les revendent, lorsqu’ils ne construisent pas pour eux-mêmes ou pour revendre un hôtel déjà bâti.
Les Lotissements du XVIIIe siècle Chaussée d'Antin ^ | 1790 cliquez sur l'image ^ |
Dans le quartier, Brongniart construit également l’hôtel Taillepied de Bondy, rue de Richelieu (1771), l’hôtel Radix de Sainte-Foix (sur le boulevard, en 1775 - illustration cliquez ici), la maison de Mademoiselle Dervieux (rue de la Victoire, 1777) puis le couvent des Capucins (rue Caumartin) en 1780-1783 (2).
Hôtel de Thélusson ^ | Hôtel de Montesson Louvre Departement des Arts Graphiques^ |
Ledoux construit les hôtels de Montmorency, de la Guimard et surtout l’hôtel de Thélusson, rue de Provence, Boullée les hôtels de Thun et de Pernon, chaussée d'Antin et Cellerier l'hôtel Necker. Tous ces hôtels seront démolis et le quartier sera profondément transformé au siècle suivant par le percement des rues La Fayette et de Châteaudun, du boulevard Haussmann et la par construction de l'Opéra Garnier. < Hôtel de Mlle Guimard. Dessin de J. B. Maréchal 1786. BnF Gallica. |
Ces lotissements témoignent de la pression foncière à la veille de la Révolution ; elle s’étend aussi vers l’est, au faubourg Poissonnière sur les terrains des Filles-Dieu : ouverture des rues d'Hauteville, d'Enghien et de l'Echiquier, implantation d'administrations royales : Petites Ecuries du roi, caserne des Gardes-Françaises et hôtel des Menus-Plaisirs (1760), construction d'hôtels particuliers (hôtel Benoît de Sainte-Paule, rue du faubourg Poissonnière, hôtel de Bourienne).
De la Révolution à 1900
De la Révolution à 1850 la chaussée d’Antin
reste le quartier à la mode, l’urbanisation se développe au nord dans le quartier de la Nouvelle Athènes (voir le quartier Saint-Georges et la Nouvelle Athènes dans Les lotissements de 1820 à 1850).
La chaussée d'Antin en 1850 ^ | La chaussée d'Antin en 1900 ^ |
L’intervention d’Haussmann modifie profondément le quartier. L’ouverture des rues Lafayette (1859-1862) et de Châteaudun (1824-1862) et surtout l’aménagement des abords de l’Opéra - rues Auber, Scribe et Halévy - à partir de 1858 vont faire disparaître la quasi-totalité des hôtels de la rue de la Chaussée d’Antin et de la rue Lafitte. Avec l’achèvement du boulevard Haussmann (en 1927) ce quartier résidentiel devient un carrefour de voies de communication qui attire les grands magasins à la fin du XIXe siècle : Le Printemps (1889, étendu en 1905), les Galeries Lafayette (1899 - 1912).
(1) Leur couvent se trouve au quartier latin, à côté de l’hôtel de Cluny
(2) Aujourd'hui lycée Condorcet
Sources
Pierre Pinon, Lotissements spéculatifs, formes urbaines et architectes à la fin de l’ancien régime, in Cahiers de la Recherche Architecturale, octobre 1980.
Pierre Pinon, Une mosaïque de fragments, la formation du IXe arrondissement, Paris des faubourgs, Editions du Pavillon de l'Arsenal, Picard, 1996.